paysages, corps, couleurs, matières, vitesses en arts plastiques, en numérique.
2010 (2009-2009), film 07'08''
Musique : Arnaud Castagné
Producteur(s) : Triptyque Films
fichier numérique 1080p
ProRes, DCP, H264 (preview)
Distribution
Cinémas
Collections
Collection départementale d'Art Contemporain de la Seine-Saint-Denis
Distributeur(s) :
Lightcone, Collectif Jeune Cinema
Prix du Groupement National des Cinémas de Recherche, Festival Côté Court 2010
À quelques kilomètres d'Ajaccio la terre brûlée cède sous le poids de la couleur. Le sol se fend et libère des énergies picturales qui s'emparent du ciel. Je vois l'horizon disparaitre mais je le fixe. Le train continue sa route
A few kilometres from Ajaccio, the burnt earth gives in to the weight of colour. The ground opens up and frees pictorial energies that take over the sky. I see the horizon disappear, but I keep it in my sights. The train continues on its way...
par Smaranda Olcèse, "Jacques Perconte : Art numérique à la galerie Charlot", Toutelaculture.com, 5 mars 2012
Après le feu (2010, 7’, vidéo) est un travail exemplaire de cette démarche. L’image prend la texture des braises, des flammes et des vagues incandescentes. Elle fond, se liquéfie, se délite, attaquée par des couleurs fortes et saturées. Seul le chemin de fer garde son obstination qui nous mène toujours plus loin dans les profondeurs de l’image – paysage. La couleur s’épuise, des aplats, des murs de « non-couleur » obscurcissent le travelling. L’abstraction appelle des formes nées d’elles-mêmes.
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par Nicole Brenez, poèmes argentiques contemporains, génie de l’instable, Après le feu présenté par Nicole Brenez dans sa conéfernce au Fresnoy le 10 Février 2011
« Au moment où l’argentique est réputé disparaître, fleurissent les poèmes visuels, souvent élégiaques, parfois aussi apocalyptiques, qui se consacrent à déployer les effets de la lumière sur la pellicule dans un contexte documentaire. S’inscrivant dans une longue tradition qui court des opérateurs Lumière et Kahn à Hollis Frampton en passant par Rudy Burckhardt et Charles Sheeler, aujourd’hui Peter Hutton, Leigton Pierce, Robert Fenz, Alexandra Cuesta, F. J. Ossang continuent de sculpter des empreintes lumineuses pour en observer les radiations et le bougé, les approximations et les insistances. ‟ Le numérique est une circulation permanente d’électrons î tandis que l’argentique est une élévation hors du noir premier, comme l’icône î 24 images fixes par 24 images fixes… ” (F.J. Ossang, 2004). Derniers feux d’artifice ? Le vocabulaire plastique des intermittences lumineuses semble loin d’être épuisé.[...]
En s’appuyant sur des réflexions de Jean-Luc Godard lors d’un échange privé, Jean-Pierre Beauviala, le créateur d’Aaton, y définit les différences entre le support argentique et la logique numérique, selon un critère principal : la stabilité. Au cours d’une conversation, rapporta Beauviala, Godard lui expliqua qu’au cinéma, chaque photogramme garde une empreinte structurée de manière différente, à cause du défilement pelliculaire et de la répartition aléatoire des sels d’argent pourtant à concentration identique. Au contraire, disait Godard, l’image numérique est issue de la traduction par le capteur CCD, petite plaque fixe et invariante portant une grille de cellules, des intensités lumineuses en flux électriques1. Autrement dit (c’est moi qui parle), l’arrivée du numérique permet de ressaisir a posteriori une spécificité constitutive de l’image argentique : son instabilité. [...]
Parmi les artistes qui continuent aujourd’hui de sculpter les empreintes lumineuses pour en observer les radiations et le bougé, les approximations et les insistances, il faut mentionner, parmi beaucoup d’autres, l’allemande Helga Fanderl, l’américain Robert Fenz, le new yorkais Jem Cohen, le thaïlandais Apichatpong Weerasethakul et en particulier ce moment exceptionnel dans l’histoire des images, qui voyait un homme spontanément s’embraser dans la jungle (intallation Primitive, 2009)… De telles initiatives texturelles et temporelles métamorphosent les phénomènes à partir d’eux-mêmes à l’instar des bombes, bouquets, embrasements, cascades ou soleils propres à la pyrotechnie. Mais pour conclure, évoquons un auteur qui inverse la partition décrite par Jean-Luc Godard et Jean- Pierre Beauviala, et travaille à ce paradoxe de conserver et infuser des valeurs argentiques dans le cinéma numérique : Jacques Perconte. Par quelles voies et pour quel dessein inverser les vapeurs de l’histoire technologique ?
Tout d’abord, Jacques Perconte organise sa pratique autour d’un principe structurant : l’imprécision. Il résume celui-ci en une paradoxale formule : « sculpter l’imprécision née des mathématiques ». Cela consiste à expérimenter de nombreux logiciels et choisir ceux qui présentent, selon le terme de Jacques Perconte, une « flexibilité » : « j’essaie et j’apprends énormément d’outils – de logiciels pour trouver ceux dont les limites sont flexibles et que l’on peut pousser. Je cherche ceux qui ne fonctionnent pas très bien et dont les mauvais fonctionnements peuvent être qualitatifs pour moi. » Jacques Perconte détourne alors les programmes qui permettent d’engendrer l’image à partir d’ « erreurs » ou de dérèglements dans la continuité des calculs de compression et de décompression. À ce titre, dès les années 1990, son oeuvre a anticipé les écritures du glitch, aujourd’hui proliférantes en musique comme dans les arts visuels.
Ensuite, l’ancrage esthétique de Jacques Perconte revendique les puissances de l’impression, aux sens à la fois phénoménologique et pictural. « Pour la plupart de mes films, avant chaque image, il existe un phénomène vibratoire naturel d’une force magique, une lumière qui m’emporte. Un sentiment qui me déstabilise. Alors j’enregistre, tout en sachant que cela sera différent. Que je ne retrouverai jamais cette brise. Parce que la technologie ne saura pas voir ce que je vois, et qu’avec ses délicats défauts (ses spécificités) elle me permettra peut-être de révéler quelque chose d’où émaneront de nouvelles ondes fondamentalement reliées aux premières ». Le dernier film à ce jour de Jacques Perconte, Impressions (2011), tourné en Normandie en HD et pour lequel il a inventé un programme spécifique de déréglement et de répétition aléatoire des accidents, revient sur quelques-uns des sites emblématiques de la peinture impressionniste dont la puissance simultanément visuelle et historique, tel un ouragan plastique, oblige à désorganiser et réinvestir les limites des ressources numériques. Impressions créées de nouvelles formes de montage par fragmentation et fondus sylleptiques, qui installent, désinstallent, confrontent et refondent avec systématicité la luminosité de l’image haute définition avec les couches et sous-couches de ses échafaudages de pixels. Il en naît une stupéfiante pâte optique constituée de greffes et de regreffes, une nouvelle palette née in situ, et un rendu du paysage normand sous forme d’une explosive complexité texturelle et chromatique. Le numérique soudain semble lancer une nouvelle asymptote vers le sensible. Enfin, faisant rebasculer le numérique du côté de l’empreinte analogique, l’image figure son engendrement symbolique à partir du motif lui-même (et non de l’outil). Dans son film Après le feu (2010), Jacques Perconte renoue involontairement mais directement avec la littéralité de l’imagerie grâce à laquelle Henri Langlois rattachait les gares Saint-Lazare de Monet à l’impondérable des Lumière : ce qui ne se joue pas seulement dans le choix du motif (un travelling avant en train, comme dans les panoramas de Félix Mesguisch, cette fois en Corse), mais dans le travail effectué à partir des poussières et taches qui recouvrent la vitre de la cabine de pilotage. À partir en effet de cette poussière d’aléa, Jacques Perconte engendre des logiques de propagation « glitchées » par où ruissellent les apparitions chromatiques, travaillées dans leurs capacités à produire des différenciations cinétiques incontrôlables. Le travail de Jacques Perconte rend un hommage flamboyant au génie instable de l’argentique perfusé dans le numérique.»
Poèmes argentiques contemporains, génie de l’instable
Au moment où l’argentique est réputé disparaître, fleurissent les poèmes visuels, souvent élégiaques, parfois aussi apocalyptiques, qui se consacrent à déployer les effets de la lumière sur la pellicule dans un contexte documentaire. S’inscrivant dans une longue tradition qui court des opérateurs Lumière et Kahn à Hollis Frampton en passant par Rudy Burckhardt et Charles Sheeler, aujourd’hui Peter Hutton, Leigton Pierce, Robert Fenz, Alexandra Cuesta, F. J. Ossang continuent de sculpter des empreintes lumineuses pour en observer les radiations et le bougé, les approximations et les insistances. ‟ Le numérique est une circulation permanente d’électrons î tandis que l’argentique est une élévation hors du noir premier, comme l’icône î 24 images fixes par 24 images fixes… ” (F.J. Ossang, 2004). Derniers feux d’artifice ? Le vocabulaire plastique des intermittences lumineuses semble loin d’être épuisé.
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par Rodolphe Olcèse, incendier ses propres images, l’expérience filmique du monde, Extraits de l’article paru dans le numéro 21 de Art Press 2, mai 2011
Jacques Perconte place dans une perspective nouvelle cette approche, simple et minimale, qui doit se traduire dans un processus de transformation du visible afin d’en éprouver, ou d’en révéler, des qualités nouvelles, Après le feu se donne comme un long travelling filmé en plan-séquence, depuis un train qui traverse les terres brà»lées de Corse. Par une série de compressions successives, Jacques Perconte nous fait perdre de vue la réalité pour entrer en contact avec sa puissance plastique, Cette opération technique montre que toute perte est corrélative d’une levée de formes neuves, ce que la simple contemplation d’un feu de bois montre avec évidence. L’image est en elle-même une métamorphose du paysage, qui prend des couleurs et des traits inédits, nés d’outils numériques. Elle se donne à nous comme une matière qui appartient d’abord au paysage lui-même, que l’artiste entrevoit, et sur laquelle notre propre regard, habité par une foule de soucis quotidiens, ne peut pas se poser.
Pour comprendre ce qu’un feu peut détruire, et retrouver quelque chose de ce qu’il a aboli, il faut incendier ses propres images, et inviter notre regard à des stances de contemplation que le mouvement des flammes produit nécessairement. La simplicité de l’expérience d’un lieu ou d’un paysage est garante de la profondeur que notre regard peut y chercher, Ce qui est vrai du feu, qui ne peut se fixer dans aucun état définitif et durable sans s’éteindre, l’est aussi, dans ce contexte, de l’image, qui ne peut trouver sa forme qu’en la cherchant toujours, c’est-à -dire en déclinant toutes les variations plastiques dont elle est capable. Après le feu propose mille états d’un seul et unique sujet -une forêt corse traversée par les rails- et rappelle que nous avons besoin de cette unicité pour regarder en vérité ce que propose une image. Car nous n’aurons jamais tout vu de ce qu’il y a à contempler dans une branche que le vent secoue au-dessus de notre tête. Tout le cinéma de Jacques Perconte en témoigne, après bien d’autres, mais dans une langue qui n’appartient qu’à lui.
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Violaine Boutet de Monvel, Jacques Perconte, l’image numérique, et le sublime, D’après Jacques Perconte, the Digital Image, and the Sublime by Violaine Boutet de Monvel / Digitalarti Mag (Paris), no. 2, Avril-Mai-Juin 2010 / traduit par Arjan Kok
Avec Après le feu (2010), créé lors d’un voyage en Corse après un incendie de forêt, Jacques Perconte a ouvert une nouvelle dimension symbolique à ses paysages. Comme nous l’avons compris plus tôt, les travaux de l’artiste et ses expériences sont en communion avec les résultats dangereux que les programmes de compression des données peuvent rendre. Pour son dernier film, tout en recueillant avec soin et en combinant des bugs ou des aberrations dans ses images, il a réussi à créer l’illusion d’une profondeur dans son décor qu’il n’existait tout simplement pas dans le paysage d’origine corse. Sur l’écran, dans une vallée qui semble suivre le cours du train, à l’arrière de laquelle l’artiste enregistrait des images, succède progressivement un vide immense, vertigineux, pixélisé, sous les voies. En d’autres termes, tout en tournant lentement son attention de l’extérieur à l’intérieur, du paysage perçu à son expression numérique, l’image réécrit littéralement et radicalement sa topographie naturelle afin de raconter une histoire entièrement nouvelle. Pourtant, et pour couronner le tout, du début à la fin, le film ne cesse jamais complètement de dépeindre la nature en dépit de tous les pixels aliénants, restés connectés à ce qui était autrefois la lumière chatoyante qui frappait les feuilles d’un arbre. Non sens?
Les tours de magie de Jacques Perconte permirent à l’image de Après le feu non seulement d’être libéré, détrônant Mère Nature pour le Grotesque, mais aussi de devenir folle! Au cours du processus, il a gagné une âme qui est prête à réinterpréter radicalement notre perception contre nos sens -l’expérience empirique de l’extérieur-, tout en nous jetant dans son corps variable, infini et inépuisable. Il nous emmène sur une chevauchée fantastique qui nous inspire un sentiment accablant de Sublime. Si la série de paysages de Jacques Perconte peut être proche de l’esthétique des Impressionnistes, en passant ses paysages on ne peut plus romantique, pour leur beauté qui reste toujours « liée à la forme de l’objet », qui est en fait représenté par une ‟ infinité ”( Emmanuel Kant, Critique du jugement, 1790). Jacques Perconte réussit à concilier la beauté avec le Sublime dans sa Flânerie numérique contre l’idéal et la compréhension actuelle de la perfection de haute définition. Loin d’être reçu à nouveau comme froid, conceptuel et trop technique, ses abstractions numériques vibrent, ressentent et nous provoquent.
Jacques Perconte, le cinéaste qui ensorcelle les pixels, Vaz, Robin
Esthétique du signal, Jacobs, Bidhan
Virtual Horizon or après le feu and the vanishing point of the real, Warne, Vincent
Vie et et mort de l'artéfact, Lê, Corentin
The best Blu-rays (and DVDs) of 2019, Nicholson, Ben
Après Le Feu, Synthétiser Le Réel, Caillard, Frédéric
Paysages traversés. Quelques films de Jacques Perconte édités chez Re:voir, Olcèse, Rodolphe
JACQUES PERCONTE – THE INTERVIEW, Dorothée Deyries-Henry
The Consulted Cinema and Some of Its Effects, Brenez, Nicole
Jacques Perconte: Explorateur de la plasticité de l'image, Catala, Laurent
Après le feu de jacques perconte, Vaugeois, Marc-Antoine
Traversées, Nieuwjaer, Raphaël
Crossings, Nieuwjaer, Raphaël
Paysages après la catastrophe et utopie plastique dans le cinéma expérimental contemporain, Martin, Marie
Paysages numériques – Quatre films de Jacques Perconte, Olcèse, Rodolphe
Jacques Perconte : Art numérique à la galerie Charlot, Olcèse, Smaranda
Les erreurs font le style, Birgé, Jean-Jacques
Hypermnésique, Massart, Guillaume
L'expérience filmique du monde, Olcèse, Rodolphe
Le cinema en mutation, Jacobs, Bidhan
Poèmes argentiques contemporains, génie de l’instable, Brenez, Nicole
Èclairage sur la lumière, Faure, Odile
Focus : Jacques Perconte, Paysages, images et matières, Olcèse, Rodolphe
Rencontre avec jacques perconte, Olcèse, Rodolphe
the digital image, and the sublime, Boutet de Monvel, Violaine
Cette pièce fait partie d'une série. La plupart du temps une série s'attache à un paysage, à une région. Il y a une certaine unité géographique.
Les motifs et figures que je travaille. En cours de développement
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